Éducation au droit d’auteur : urgence et nécessité en Afrique

Le 23 avril est la Journée mondiale du livre et du droit d'auteur

La Journée mondiale du livre et du droit d'auteur est célébrée le 23 avril de chaque année.

Ce billet de blog est le quatrième d'une série de collaborations entre l'ADEA et le Partenariat mondial pour l'éducation (GPE) 

La Journée mondiale du livre et du droit d’auteur est célébrée chaque 23 avril et il s’agit d’une date symbolique pour la littérature universelle. C'est en effet à cette date en 1616 que William Shakespeare, Miguel de Cervantes et Inca Garcilaso de la Vega sont tous les trois décédés.

De plus, chaque année l’UNESCO et les trois organisations professionnelles internationales du monde du livre que sont l’Union internationale des éditeurs (UIE), la Fédération internationale des libraires (IBF) et la Fédération internationale des associations et institutions des bibliothécaires (IFLA) désignent la capitale mondiale du livre pour une période d’un an, à compter du 23 avril. C’est la ville de Conakry en Guinée qui a été choisie cette année..  

Le droit d’auteur et ses défis en Afrique

La question de la protection du droit d’auteur demeure d’actualité en Afrique depuis des décennies. Le présent blog sur “l’éducation au droit d’auteur” n’est donc pas une nouveauté pour tous ceux qui connaissent la vie du livre dans la majorité des pays du continent, dont la principale caractéristique est marquée par les violations quotidiennes de tous genres : reprographie illicite des documents, piratage des œuvres littéraires et scientifiques - dont celle à grande échelle des manuels scolaires, et la méconnaissance du droit et des mesures de protection existants.

Trois constats sur la culture du droit d’auteur 

Les contacts avec les éditeurs et les auteurs un peu partout sur le continent permettent de faire un constat liminaire par rapport à la culture du droit d’auteur qui se résume aux principaux points suivants :

  1. Tout le monde parle du droit d’auteur, mais peu en connaissent les composantes dans ses aspects juridiques et légaux. Particulièrement au niveau des éditeurs, des auteurs, des libraires, des bibliothécaires ainsi que des ONG qui publient. Nous mettons l’accent sur la méconnaissance même de l’existence de politiques nationales en matière de droit d’auteur et de droit voisins dans de très nombreux pays.
  2. Les auteurs eux-mêmes ont souvent très peu de connaissance sur la portée et les formes concrètes de protection que leur apportent les législations actuelles sur le droit d’auteur, tant au niveau national qu’international. L’information ne circule pas, surtout pour les débutants ou ceux qui ont peu publié. Certains éditeurs du nord comme du sud profitent d’ailleurs de ce déficit pour causer toutes sortes d’abus (surtout dans le domaine des manuels scolaires) en ne payant pas de droits aux auteurs sur les livres vendus.
  3. Il existe peu ou pas de collaboration entre les associations d’éditeurs, et même d’auteurs dans certains cas, avec les organismes destinés à la protection du droit d’auteur dans chaque pays, notamment les bureaux nationaux des droits d’auteurs.

Cette situation constitue un important facteur de blocage à la création intellectuelle, 

tant il est évident que le respect du droit d’auteur favorise la créativité nationale, laquelle donne naissance à l’industrie culturelle, source de richesses économiques et d’emplois pour le marché du travail.

Cette pratique agrandit, bien évidemment, l’ampleur des violations des droits patrimoniaux et qui constituent la principale source de la démotivation des créateurs littéraires. Ce phénomène atteint même des proportions très grandes quand il s’agit des productions faites dans les langues nationales.

L’existence de règlementation n’est pas garantie de leur application

Des politiques nationales en matière de protection du droit d’auteur existent dans tous les pays africains et sont mises en œuvre par les Bureaux nationaux du droit d’auteur. Cependant, dans le domaine précis de la production littéraire, la plupart des maisons d’édition font une gestion directe du droit d’auteur à leur niveau, sans se conformer à aucune législation nationale particulièrement dans les pays francophones.

En effet, aussi bien sur le plan de la constitution des termes du contrat que sur son mode de gestion, chaque maison applique sa propre pratique, que celle-ci soit proche ou éloignée des normes internationalement admises.

Mais, c’est tout de même un acquis que les éditeurs africains respectent le principe de l’obligation d’établir des contrats avec les auteurs, même si on ne peut pas toujours garantir qu’ils sont effectivement mis en application. L’éducation et la sensibilisation y contribueront.  

Prise de conscience, dialogue et concertation pour la protection du droit d’auteur

Dans cette dynamique, une des contraintes urgentes est d’assurer, par le biais de toutes les entités traitant de la question du droit d’auteur, une connaissance des législations nationales et internationales en matière de protection du droit d’auteur et du droit de reproduction reprographique, et d’en faire la plus large diffusion possible au sein des organisations regroupant les différents acteurs de la chaine du livre dans le pays.

En effet, la prise de conscience de l’importance du respect et de la protection effective du droit d’auteur ne peut se faire aujourd’hui qu’à travers un dialogue et la concertation entre tous les acteurs de la chaîne du livre au niveau local, national, régional, sous régional et international.

Cette concertation devra nécessairement toucher les décideurs, les hommes de loi, la société civile et les professionnels de la communication et des médias.

Plus généralement, les mécanismes liés tant à l’éducation qu’à la protection du droit d’auteur doivent être pris en considération dans les politiques nationales du livre à mettre en place dans les pays comme le suggère sans cesse le Groupe de travail de l’ADEA sur les livres et les matériels éducatifs (GTLME).

Recommandations et suggestions finales

Au niveau des stratégies à envisager pour sensibiliser, éduquer sur le droit d’auteur, les approches suivantes sont recommandées aux associations professionnelles nationales, entre autres

  1. l’organisation de manifestations professionnelles et des actions de formation rendant visibles les initiatives en faveur du droit d’auteur (journées de réflexion, séminaires et ateliers de formation des éditeurs, écrivains, des libraires, des bibliothécaires, des juristes, etc.)
  2. le suivi de l’application des Politiques nationales du livre, notamment les clauses relatives à la protection du droit d’auteur ;
  3. la diffusion médiatique de supports d’information et de sensibilisation du public sur la promotion et le respect du droit d’auteur.

Malgré le retard actuel dans ce domaine, les pays africains se doivent d’intégrer le processus mondial d’évolution et de promotion du droit d’auteur. Nous ne devons pas nous marginaliser et cela ne se fera que par une éducation conséquente de l’ensemble des parties prenantes de la question du livre, afin d’en assurer une large prise de conscience et faire de la protection du droit d’auteur un véritable outil de motivation à la création littéraire et artistique.