La pendule de l’éducation : le rôle de la discipline dans les résultats de l’apprenant et la qualité de vie

Des enfants dans une salle de classe. Crédit photo: Bright Kwabena Kyere

Introduction

La discipline est l’action délibérée, ou l’absence d’action, visant à réguler le comportement. C’est la pratique d’une adhésion franche et rigoureuse à la législation et aux directives, ainsi qu’aux normes et valeurs culturelles ; la capacité de se contrôler ou de contrôler autrui, même dans des circonstances difficiles. La discipline consiste à enseigner les comportements acceptables et à désapprendre les comportements inadaptés en apportant un soutien, des orientations et des directives pour gérer le comportement. Il s’agit de fixer des limites, de clarifier les rôles, les responsabilités et les attentes mutuelles ainsi que d’œuvrer à une vie prévisible, ordonnée et stable.

Conformément à la célèbre citation selon laquelle « les choix ont des conséquences », l’inobservance ou la non-pratique de la discipline devrait entraîner une forme de mesures correctives. Les situations abondent où, malheureusement, une telle « correction » fait suite à un grave facteur déclencheur aux conséquences désastreuses. Citons à titre d’exemple le coronavirus mondial – techniquement appelé COVID-19 – qui a évolué en une pandémie en moins de quatre mois, causant des souffrances et des décès indicibles dans le monde entier. Le manque de discipline individuelle, notamment le respect de consignes simples telles que se laver soigneusement les mains avec du savon, garder une distance sociale d’un à deux mètres et se mettre en quarantaine pendant 14 jours, aggrave la propagation exponentielle de la pandémie.

Dans l’environnement d’apprentissage, l’indiscipline peut se manifester par la désobéissance aux règles établies, les brimades, l’absentéisme scolaire, les retards à l’école, l’idolâtrie, l’abus d’alcool et de drogues, les insultes/agressions, le harcèlement sexuel, le vol, les émeutes, les grèves, les incendies d’école, le gazage des apprenants et bien d’autres vices antisociaux. Si on la laisse se poursuivre, cette indiscipline se manifeste plus tard dans la vie. En revanche, le fait d’inculquer la discipline dès le plus jeune âge contribue à mettre de l’ordre dans les différentes facettes de la vie d’une personne – « il suffit de regarder nos forces de sécurité ou nos militaires ». 

Importance de la discipline dans les foyers et les établissements d’enseignement

La discipline a un impact sur le processus d’apprentissage en créant un environnement sans stress pour répartir le temps entre les différentes activités, améliore la planification par l’observance et le maintien d’une routine quotidienne définie, façonne le caractère de l’apprenant et renforce sa motivation, permet de donner le bon exemple et contribue positivement à l’obtention de meilleures notes. Des éléments, tels que l’anxiété liée aux examens, l’environnement, la motivation et les émotions, doivent être pris en compte lors de l’élaboration de modèles de résultats scolaires. Diverses études ont mis en évidence un lien positif entre la discipline chez les apprenants et leurs résultats scolaires, ces derniers s’améliorant avec l’augmentation du niveau de discipline.

Bien que les établissements d’enseignement aient le devoir d’appliquer les règles ou le code de conduite qui guident le comportement des apprenants, les parents ont également un rôle à jouer pour garantir la conformité. Des aspects tels que le code vestimentaire, les coiffures et les bonnes manières commencent à la maison. Les parents et les éducateurs, en particulier les chefs d’établissement, sont deux piliers qui ont une influence importante sur la préparation des apprenants. Si l’on ne s’attaque pas à la discipline dès le plus jeune âge, il restera difficile de parvenir à une éducation de qualité ayant un impact complet sur l’apprenant. Ainsi, si les apprenants à tous les niveaux sont disciplinés, ils sont plus susceptibles d’acquérir facilement les connaissances et les compétences requises, car ils sont concentrés et auto-motivés.

En dépit de leurs calendriers de travail chargés, les parents devraient consacrer du temps à leurs enfants pour discuter de diverses questions, notamment de la discipline. Il est également de plus en plus nécessaire de renforcer l’orientation et les services de conseil dans les écoles, afin d’aider les apprenants à atteindre les valeurs fixées. Un enfant ou un jeune dont la discipline sociale et spirituelle est forte a de grandes chances d’exceller à l’école. La discipline la plus importante est l’autodiscipline, que l’apprenant devrait cultiver en fixant des normes et en déterminant jusqu’où il peut aller malgré les nombreux obstacles qui se posent. Au plus fort de l’épidémie de COVID-19, où l’apprentissage a été transféré à la maison, puisque les écoles sont fermées et que la supervision est aux mains des parents, l’autodiscipline jouera un rôle important pour garantir la continuité de l’apprentissage.

La punition et le processus de développement et d’apprentissage de l’enfant

La punition sert d’outil pour inculquer la discipline. Elle peut être soit positive soit négative. Les punitions physiques ou corporelles comprennent la bastonnade, les travaux physiques tels que l’arrosage des jardins scolaires ou la tonte de gazon, le fait de s’agenouiller ou de marcher à genoux, ou de faire des pompes. Dans le cadre de l’application des conventions sur les droits de l’enfant, plusieurs pays ont aboli les châtiments corporels dans les écoles, bien que cette pratique illégale soit encore courante dans certaines écoles.

Les apprenants s’efforcent d’être meilleurs lorsqu’on les fait réfléchir à leurs méfaits.
Les opposants au châtiment corporel estiment qu’il a un impact négatif sur les résultats d’apprentissage de l’enfant et sur sa santé mentale en général. Il peut également pousser les enfants à développer un comportement agressif par le biais du modelage – tenter de changer le comportement d’un enfant en lui infligeant de la douleur risque de le pousser à faire de même avec ses pairs dont il pourrait vouloir influencer les actions. Ce type de punition peut également frôler la maltraitance des enfants et pourrait légitimer la violence chez les enfants qui intériorisent ce qu’ils vivent. Toutefois, les partisans du châtiment corporel en disconviennent. Certains parents et éducateurs considèrent qu’il est important pour inculquer la discipline aux enfants. Ils affirment que le simple fait de supprimer un stimulus agréable ou réconfortant – tel qu’un enseignant qui fait sortir de la classe un enfant qui se comporte mal pendant un certain temps ou un parent qui « interdit » à un enfant de regarder la télévision – ne suffit pas à diminuer la probabilité de récidive du comportement de l’enfant à l’avenir, et qu’une telle action peut être contre-productive.

Les opposants au châtiment corporel préfèrent la « punition positive », car elle réduit la probabilité de récidive du comportement à l’avenir. Un exemple tient à la suppression totale des récompenses, également appelée renforcement positif, pour décourager la répétition d’une mauvaise conduite. Une troisième perspective tient à l’amélioration du développement cognitif des enfants par le biais d’interactions sociales qui, à leur tour, influencent leur apprentissage et leur motivation à apprendre. Cela inclut l’attachement aux personnes qui s’occupent des enfants, l’amitié et l’apprentissage collaboratif entre pairs ainsi que le développement de relations saines entre les enfants et les enseignants. Dans un tel scénario, les méthodes verbales de discipline, y compris les explications et le raisonnement, sont susceptibles de fournir un stimulus cognitif plus important que le recours au châtiment corporel, qui peut entraîner de mauvais résultats cognitifs. 

En fin de compte, l’efficacité des sanctions dépend considérablement du moment où elles sont prises. Une punition prononcée immédiatement après une réponse est probablement la plus efficace, tandis que plus le décalage entre la réponse et la punition est long, plus il y a de chance que la punition s’associe à d’autres événements qui interviennent. Les renforcements positifs et négatifs sont des aspects essentiels de la modification du comportement après l’administration de la punition. 

Impact de la punition sur les résultats de l’apprenant, et autres options

Afin d’analyser la relation qui existe entre la punition et les résultats de l’apprenant, nous devons être clairs sur ces derniers, qui constituent la mesure dans laquelle un apprenant, un éducateur ou un établissement a atteint ses objectifs éducatifs à court ou à long terme. Ils se mesurent généralement par des examens qui permettent de vérifier la satisfaction de critères éducatifs tels que les diplômes et les licences, ou par des évaluations continues conduisant à une certaine forme d’agrégation des notes.

En fin de compte, nous sommes comme un repas bien préparé dans lequel les différents ingrédients se mélangent bien, ensemble...nous devons jouer notre partition sans exagérer nos partitions individuelles ou minimiser celles des autres.
La punition ou même la menace de punition, selon le type, a un impact à la fois positif et négatif sur les résultats de l’apprenant. L’impact négatif comprend la peur et l’anxiété qui faussent la motivation d’apprentissage (l’enfant apprend à contenter l’enseignant et non à acquérir des compétences et des connaissances), la perte d’intérêt pour la matière, les sentiments négatifs à l’égard des enseignants et des cours qu’ils dispensent, l’absentéisme et le désengagement, l’agression, la diminution de l’estime de soi, le ressentiment, l’abus d’alcool et de drogues, qui se traduisent par de mauvais résultats scolaires. Un enfant qui reçoit des compliments pour avoir bien appris est susceptible d’obtenir de meilleurs résultats scolaires qu’un enfant qui est puni pour ses mauvais résultats. Sur un plan positif, le châtiment corporel peut contribuer à maintenir la discipline en classe et permettre aux apprenants de développer leurs responsabilités si on leur fait comprendre et apprécier leurs fautes. Ces apprenants peuvent se réformer en classe, à l’école ou à la maison, en s’efforçant d’avoir un bon comportement et de développer une attitude responsable permettant d’améliorer leurs résultats.

La motivation et l’engagement des apprenants constituent l’un des six facteurs de réussite scolaire (les autres sont la qualité de la conception pédagogique, la précision et l’alignement, les formes et la qualité des données, l’alphabétisation complète et la profondeur des connaissances). Il est essentiel d’aider les apprenants à développer une motivation intrinsèque par l’effort personnel dans la maîtrise du contenu éducatif. Un apprenant motivé ayant peu ou pas d’expérience technologique et disposant de ressources limitées est susceptible d’obtenir de bien meilleurs résultats qu’un apprenant non motivé dans une  « classe du XXIe siècle ». Une discipline positive contribue à améliorer la motivation de l’apprenant en enseignant plutôt qu’en punissant et, par conséquent, aide les apprenants à réussir et à s’épanouir à l’école.

La discipline positive permet aux élèves d’apprendre et d’adapter leurs comportements pour répondre aux attentes en classe, tout en leur apprenant à faire de meilleurs choix à l’âge adulte. Ces choix comprennent le fait de prendre le temps de réfléchir profondément sur soi et sur la vie, afin de s’ancrer dans une problématique donnée. C’est l’occasion de chercher le bon côté des choses dans des situations difficiles ou éprouvantes, d’apprécier et de cerner la situation dans son ensemble et de saisir les occasions qui se présentent en période de désespoir avec une grande humilité. La perception du comportement adulte chez ceux qui sont disciplinés est manifeste. Dans le cas de la pandémie de COVID-19 en cours, les adultes disciplinés ne sont pas ceux qui sortent en cachette pour rendre visite à des amis ou qui participent à de grands rassemblements, y compris fréquentent les lieux de divertissement, contrairement à ce que disent les autorités. L’individu discipliné observe les règles fixées par les autorités et peut avoir une meilleure appréciation de la pandémie et y voir une occasion de réfléchir à la façon de prendre soin les uns des autres et de s’entraider, car « je suis parce que tu es » – c’est cela l’esprit d’Ubuntu.

Au nombre des autres moyens de faire appliquer une discipline positive, on peut citer les suivants :

  • Apprendre à « être » – faire passer les apprenants par le processus de connaissance de soi et les motiver à voir l’importance d’acquérir les compétences et les attitudes nécessaires pour améliorer leur personnalité ; leur faire prendre une plus grande conscience d’eux-mêmes et des autres ; s’assurer que les apprenants comprennent qu’ils ont le droit d’être entendus et que leur point de vue est pris en compte lors de la prise de décisions importantes.
  • Supprimer les privilèges qui semblent être à l’origine de mauvais résultats – comme regarder la télévision, rendre visite à des amis ou recevoir de l’argent de poche ; encadrer en renforçant les attitudes positives par des éloges et de la reconnaissance ; utiliser des techniques de gestion du comportement pour promouvoir l’interaction sociale en classe entre les élèves ; et avoir recours à des techniques de renforcement positif qui récompensent les comportements appropriés et favorisent l’autogestion par des conseils.
  • Temps mort – qui consiste à sortir l’enfant de la situation pour lui donner le temps de réfléchir aux conséquences de son comportement délictueux. Le temps mort implique la non-exclusion (l’apprenant peut observer, mais pas participer, aux activités en cours en classe), l’exclusion (l’apprenant est exclu de la participation et de l’observation des activités en cours en classe sans être expulsé de la classe) et l’isolement (placer l’apprenant dans un endroit séparé pendant une période prédéterminée). Pour être efficace, le temps mort doit être cohérent et ne pas durer longtemps.
  • Renforcement positif – par l’appréciation de l’excellence des résultats. Une discipline positive et non violente envoie le message que les conflits peuvent être résolus sans saper le respect.

Une bonne discipline scolaire dépend non seulement de réactions non violentes aux mauvais comportements des apprenants, mais également d’enseignants compétents et correctement formés.

Quels facteurs les écoles peuvent-elles prendre en compte pour discipliner les apprenants ?

En appliquant une discipline positive, les enseignants et les parents devraient tenir compte des éléments ci-après, et s’attacher à maintenir un environnement scolaire sûr et digne pour les apprenants :

  1. L’action aide-t-elle l’enfant à ressentir un sentiment de connexion ?
  2. L’action est-elle à la fois aimable et ferme, et mutuellement respectueuse et encourageante ?
  3. L’action est-elle orientée vers un effet à long terme sur l’enfant ? Tient-elle compte de ce que l’enfant pense, ressent, apprend et décide à propos de lui-même et du monde ?
  4. L’action enseigne-t-elle des compétences sociales et de vie importantes telles que le respect, la préoccupation pour les autres, la résolution de problèmes et la coopération, ainsi que les compétences permettant de contribuer à la vie familiale, de l’école ou de la communauté au sens large ?
  5. L’action encourage-t-elle l’enfant à découvrir ses capacités en termes d’utilisation constructive de ses capacités et de son autonomie personnels ?

Le système de carte – un exemple de discipline positive : Un enfant qui se comporte mal reçoit un « carton jaune » en guise d’avertissement verbal de la part de l’enseignant. Si la situation persiste, il reçoit une autre carte et est séparé de ses camarades. Le cas échéant, l’enseignant donne un « carton rouge » et l’enfant est référé au directeur de l’école.

Conclusion

Les résultats de l’apprenant entretiennent un lien de dépendance étroite avec sa personnalité et son environnement social. Les apprenants ont divers traits de motivation dans leur quête d’éducation. Ceux qui ont un bon niveau de ces traits ont recours à de nombreuses stratégies d’apprentissage en fonction de leurs croyances : ceux qui ont une motivation extrinsèque sont plus susceptibles d’avoir recours à des stratégies qui incluent une bonne planification et une meilleure organisation. Dans ce contexte et compte tenu du rôle important de la motivation chez les apprenants, les enseignants doivent s’attacher à inculquer aux apprenants la motivation nécessaire pour promouvoir leur efficacité personnelle et croire fermement en leurs capacités à réussir. Les enseignants doivent également être bien préparés à intégrer efficacement le système de valeurs chez l’apprenant, tout en pratiquant le même, et utiliser diverses stratégies pour donner des instructions aux apprenants. En dernière analyse, nous sommes comme un repas bien préparé dont les différents ingrédients se mélangent bien, ensemble...nous devons jouer notre partition sans exagérer nos partitions individuelles ou minimiser celles des autres.