Le rôle de l'enseignement supérieur dans l'autonomisation des femmes

Le 8 mars, Journée internationale des femmes, nous célébrons les femmes et les filles de tous les pays !

Jour de remise des diplômes aux étudiants de l'école de formation des enseignants pour enfants à besoins spéciaux de Sebeta dans la région d'Oromia en Ethiopie. Photo: PME/Kelley Lynch

Ce billet de blog est le 3ème publié en 2020 dans le cadre d'une collaboration entre l'Association pour le développement de l'éducation en Afrique (ADEA) et le Partenariat mondial pour l'éducation.

L’édition 2020 de la Journée internationale des femmes a pour thème « Je suis de la Génération Égalité : Levez-vous pour les droits des femmes ».

Ce thème coïncide avec la nouvelle campagne plurigénérationnelle d’ONU Femmes, Génération Égalité, qui marque le 25e anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.

Un constat sur le Programme d’action de Beijing

En 2020, le Programme d’action de Beijing nécessite une évaluation après une génération. Le programme lancé en 1995 ciblait 12 domaines critiques (la pauvreté, l’éducation et la formation, etc.) établis pour éliminer les obstacles qui empêchent les femmes de participer de manière égale aux domaines de la vie et de la sphère publique ou privée.

Aujourd’hui, et malgré les progrès réalisés, des restrictions légales ont empêché 2,7 milliards de femmes d’avoir le même choix que les hommes en matière d’emploi.

Moins de 25 % des parlementaires étaient des femmes en 2019. Et une femme sur trois fait toujours l’expérience d’une violence basée sur le genre.

En plus, aucun pays ne peut prétendre d’avoir atteint l’égalité des sexes particulièrement dans les systèmes d’éducation.

Dans ce secteur, il faut entendre par égalité des sexes :

  • Chez les apprenants, avoir les mêmes des chances en termes d’accès, de rétention et de choix pour les filles et les garçons.
  • Chez les enseignants et les administrateurs, avoir la parité femme-homme à tous les niveaux du système éducatif (c’est à dire leadership, gouvernance, opérationnel et financement).

Renverser la tendance est possible à travers l’enseignement

Les femmes restent encore sous-valorisées, elles continuent à travailler plus, à gagner moins et à être sous-représentées aux postes de responsabilités.

Pour un changement positif dans ces domaines, il ne faut pas se borner à déterminer les inégalités. En revanche, il faut :

  • Revisiter la façon dont les gens la vivent au sein des ménages, des organisations et des communautés découlant de la conception et structuration des différents systèmes de la société. 
  • Mettre en œuvre la recherche sexotransformatrice qui favorise l’autonomisation des femmes, par le contrôle partagé des ressources et la prise de décision commune. Cette recherche exige un ensemble complexe de compétences, de capacités et d’expertise.

Dans le secteur de l’enseignement par exemple, l’écart est toujours plus profond dans le domaine des sciences et techniques. Les filles ont besoin d’être formées pour participer au développement des nations. Elles sont devenues majoritaires dans l’enseignement supérieur mais demeurent sous-représentées dans les formations scientifiques et technologiques.

Au Sénégal par exemple, les filles représentent plus de 50 % des étudiants de l’enseignement supérieur. Si la parité est dépassée au sein de la population étudiante, ce n’est pas le cas quand on s’intéresse aux formations scientifiques et technologiques, loin s’en faut.

Seuls 40 % des étudiants de ces filières sont des femmes selon les données du ministère de l’Enseignement supérieur.

La parité en matière de scolarisation et d’achèvement des études est récente en Afrique, de sorte que le vivier actuel de femmes actives est composé des femmes qui pouvaient aller à l’école à l’époque où les filles étaient beaucoup moins scolarisées.

Ce constat est assez général : l’enseignement des sciences, des technologies, de l’ingénierie et des mathématiques (STEM) connait une crise mondiale caractérisée par un manque d’intérêt des jeunes générations pour des filières que l’on sait pourtant génératrices d’emplois et de croissance économique.

Rendre les filières scientifiques attrayantes à tous

À l’échelle mondiale, les femmes ont moins de chances que les hommes d'intégrer les filières scientifiques et sont plus susceptibles de les quitter. Cela s’explique en partie par le fait que moins de femmes que d’hommes choisissent d’étudier ces disciplines, mais aussi par la composition de la population active.

L’évolution du profil des étudiants et des professionnels des sciences ne sera pas rapide, car elle dépend à la fois de la quantité et de la qualité de l’éducation.

Les raisons pour lesquelles les femmes sont moins nombreuses à s’orienter vers les filières scientifiques sont complexes et doivent encore être analysées en détail en fonction du contexte.

Chaque pays, après son auto-analyse, devra appuyer sur différents leviers au niveau individuel, communautaire et sociétal.

La perception individuelle et le sentiment d’efficacité personnelle sont des éléments déterminants. Nous devons changer de paradigme, car la répartition des rôles reste très sexuée dans notre société.

Après la naissance d’un enfant, c’est la mère qui, dans l’immense majorité des cas, réduit son activité professionnelle pour prendre en charge la plupart des tâches domestiques. Cette valeur inculquée dès le plus jeune âge a déjà contribué à l’orientation des petites filles vers des jeux puis des filières scolaires réputés féminins.

Comment permettre aux femmes de prospérer dans les disciplines scientifiques ?

Nous devons créer un environnement favorable selon une approche multisectorielle pour :

  • Permettre aux filles très tôt d’acquérir une expérience concrète pendant leurs études et leur faire découvrir la réussite exemplaire de femmes exerçant ces métiers.
  • Agir de façon précoce sur tous les fronts pour renforcer la confiance en elles et avoir un impact réel sur leur augmentation dans les domaines des sciences.
  • Renforcer les possibilités de sensibilisation et de mise en réseau de différentes parties prenantes pour promouvoir leur accès aux STEM.
  • Identifier et développer un réseau de mentors (par exemple de carrière, industriels ou scientifiques) parmi les entreprises partenaires pour encadrer les jeunes femmes (étudiantes ou entrepreneures).
  • Développer un réseau d’entreprises partenaires, en particulier d’entreprises dirigées par des femmes, leur offrant une opportunité d’expérience professionnelle et de développement des compétences.

Le Sénégal est dans cette dynamique avec les concours, dès le 1er cycle de lycée, de Miss Sciences et Miss Mathématiques. Dans l’enseignement supérieur, le pays a initié depuis 2013 le Programme d’appui à la promotion des enseignantes chercheures du Sénégal (PAPES), exclusivement dédié aux enseignantes-chercheures et aux chercheures afin de promouvoir et de stimuler l’insertion et le maintien des femmes dans l’univers de la recherche.

Les filles et les femmes ont besoin de prospérer dans les disciplines scientifiques et contribuer aux découvertes tant capitales pour le monde.

L’adage dit: « éduquer une femme équivaut à éduquer une nation ».